Collège militaire royal de Saint-Jean
Le 17 novembre 2017 au Collège militaire royal de Saint-Jean, un colloque sur l’enjeu de la diversité et de l’inclusion au sein des forces armées et des corps a eu lieu. Ce colloque fut organisé par le Centre international des études de la profession des armes (CIEPA) nouvellement créée en avril dernier. L’objectif de cette conférence se porte sur la sensibilisation et l’intervention sommative envers les particularités existantes au sein des sociétés libérales. Cela se traduit par la création d’un pont communautaire de communication entre les militaires, les agents de la paix et les académiciens. Ce que l’on appelle la diversité. Le directeur du CIEPA et professeur adjoint du collège, Ian Parenteau, précise que la diversité englobe autant la culture, la religion, l’orientation sexuelle, l’ethnie, le handicap et le genre.
Le colloque sur la diversité se divise sous trois questions particulières : quels sont les défis ? Comment la diversité s’exprime-t-elle ? Et, quels sont les politiques mises en place et leurs buts ? En somme, dix invités ont partagé leurs expériences et leurs connaissances sur le sujet.
Avant le commencement des panels de discussion, le contre-amiral Luc Cassivi, commandant de l’Académie canadienne de la Défense partage son vécu militaire. Il aborde également les politiques militaires canadiennes. De son côté, Elyamine Settoul, chercheur à l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (IRSEM), dévoile sa thèse de doctorat sur la gestion de la diversité dans l’Armée française. Les deux présentations illustrent un portrait distinct entre le Canada et la France, par le regard historique, politique et social. On conclut que le Canada a une plus grande ouverture sur la diversité et prend plus d’initiative en matière d’intégration que son homologue. Surtout sur le fait qu’Elyamine Settoul constate dans son étude que les gens ne voient pas de minorité dans l’Armée française. En réalité, tout militaire est français.
Cette brève introduction sur le sujet de la diversité permet d’élaborer une discussion avec trois intervenants sur les défis. Louis Rousseau, professeur associé de l’UQAM, est le premier intervenant à partager ses connaissances. Spécialiste sur la religion, il parle de la religion et du multiculturalisme qui recomposent l’identité du Québec. Il souligne qu’il existe trois concepts-clefs à retenir : la conscience éthique, la recomposition identitaire et les axes d’observations. La deuxième intervenante, Hélène Dion, directrice du service de police de Repentigny et vétéran, discute de la sensibilité de l’image de la police perçue par la société. Une mauvaise communication et relation d’échange entre les corps de police et les citoyens alimentent des tensions en matière de diversité. Elle souligne qu’une des solutions est d’encourager une police de proximité. Le dernier intervenant, Jamal Eddine Tadlaoui, est un professeur de l’Université de Sherbrooke et de l’UQAM spécialiste en médiation culturelle. Il valorise l’importance d’avoir une même longueur d’onde sur la définition et le rôle de la médiation en situation de conflit. Cette méthode, longtemps soulignée par Confucius, permet de trouver une résolution de désaccord entre des partis. Cela ne peut se faire sans considérer quatre éléments-clefs : la logique du dialogue, la logique de responsabilité, la liberté des personnes et la complexité des relations. En somme, ce panel orienté sur un raisonnement théorique et de faits observables met en reliefs des évidences.
Le deuxième panel de discussion, qui traite la capacité de la diversité à mettre plus d’emphase sur les perceptions et les pratiques que les théories. On le remarque avec la présentation de la thèse de doctorat du lieutenant de vaisseau Delphine Bonnardot, sur l’importance des communications en lien dans la diversité et l’inclusion. Elle aborde une partie de son travail, orienté sur la notion de la communication. En effet, elle illustre que la communication a plusieurs stratégies qui influencent la confiance. Cela permet une cohérence du message, qui transformera la stratégie de communication en une communication stratégique. Le tout se verra à une formulation de définition, mais aussi de redéfinition et une réorientation de communication. Elle nous en éclaircit le concept par l’usage d’allégories et d’exemples des femmes en milieu militaire. La perception pessimiste de l’acceptation profonde et de l’intégration des femmes se voit particulière par cette phrase : « We need you, but we don’t want you ». La deuxième intervenante, le major Julie Labreque, présente le sujet sous forme pédagogique avec l’historique des politiques canadiennes, encourageant la diversité au sein des Forces. De plus, elle explique que l’agenda de la défense se concentre sur le bien-être du personnel, en percevant les similarités et non les différences. Les derniers intervenants ont fait part de la mise en place de l’équipe D+. C’est un collectif de bénévoles, offrant des services auprès des militaires de communautés minoritaires de la deuxième division, pour avoir une meilleure qualité de vie. Les orateurs, le capitaine André P. Jean et le vétéran Daniel Dufresne, recherchant actuellement des bénévoles pour joindre leur équipe, précisent que les opportunités sont plus grandes que les obstacles. Le panel a donc commencé par une vision pessimiste, avant de nuancer vers une perception plus optimiste.
Thi Be Nguyen fait partie du dernier panel, qui discute de l’existence de politiques et des objectifs de la diversité. Elle partage son vécu en tant que Vietnamienne arrivée au Canada. Elle raconte l’implication de l’aide humanitaire canadienne, tant immigration que militaire, auprès des réfugiés. Le vécu personnel sur le terrain a porté le développement de l’intégration au sein de la communauté sans intervention gouvernementale. Elle reconnaît que depuis les dernières années le capital social de Robert Putnam est en déclin. Pour remédier à cela, la confiance est créée par la force par un lien de causalité. Mais cela ne se fait pas de manière immédiate. En bref, son message valorise la diversification et amène « plus de joueurs de bowling, mais moins de Leagues ».
Le colloque se conclut par quelques mots du commandant du Collège militaire royal de Saint-Jean, le colonel Gervais Carpentier. Il souligne qu’il faut respecter les faits, mais aussi chercher à comprendre et avoir une ouverture d’esprit pour que la diversité soit attrayante pour tous.
Pour conclure, la conférence sur la diversité a été l’occasion de partager diverses connaissances avec de multiples acteurs, principalement issus du milieu militaire et académique. La conférence a manqué de profondeur, puisqu’elle a porté sur des faits déjà connus. Cependant, la conférence reste un événement incontournable illustrant un modèle d’initiative militaire canadienne à regarder de près.
~ Laura Bokor est une étudiante à la maîtrise en politique appliquées de l’Université de Sherbrooke, stagiaire à l’institut CAD et réserviste au 2RAC.